Récit (un peu arrangé)
Aujourd’hui, nous apprenons que l’école de nos enfants a été sélectionnée pour un dépistage COVID-19.
Le ministère a sans doute fait comme moi quand je procède à un tirage au sort.
Je prends l’enfant le plus innocent (je ne dirai pas lequel ni s’il s’agit d’un des miens), j’écris vulgairement les noms des participants sur un papier en veillant à ce que ce soit un minimum lisible, je demande à l’enfant de mélanger grossièrement et BIM, sélection !
Bien urbains, Minsk et moi donnons notre autorisation pour que nos enfants participent à cette campagne.
Etant donné qu’il s’agit de tests salivaires, nous ne pensons pas envoyer nos enfants au casse-pipe…
Les enfants de l’école élémentaire sont testés le matin, les élèves de maternelle l’après-midi, à la chaîne.
Une fois la journée passée, je questionne Vilnius.
Il est verdâtre, presque livide et peine à mettre en mots ce qu’il a vécu.
Sa description me plonge immédiatement dans un univers de Spielberg.
J’en retiens les scaphandres des laborantins, les masques à gaz, des tubes contenant des substances verdâtres et je crois comprendre que mon fils a été retenu en otage.
Sueur froide.
La pâleur de mon aînée validerait presque ce récit.
Je m’inquiète et je suis heureuse que Vilnius ait pu rentrer à la maison sain et sauf.
Je suis tellement sonnée, retournée par cette mésaventure que c’est comme si je l’avais vécue. Je pâlis à mon tour.
Santiago joue dans la pièce à côté et ses bruitages et onomatopées me font reprendre mes esprits.
Je choisis de passer à un tout autre sujet et de n’en retenir que le meilleur.
Mes enfants sont à la maison et tout le monde va bien. GRATITUDE. RECONNAISSANCE INFINIE.
Nous passons joyeusement à table. Entre les patates et le fromage, Santiago raconte inopinément :
-Tu sais, maman, c’était le test savilaire aujourd’hui. Tu te rappelles ? C’était drôle ! J’ai craché dans un tube et je suis reparti…
Surprise du récit étrangement différent de Vilnius, je rétorque :
-Ah bon, tu n’as pas eu peur ? Les médecins avaient des costumes qui leur cachaient le visage ?
-Bah non, c’était comme chez le docteur.
-Ah…
Le protocole asséné aux petits serait donc plus soft ?
Deux semaines plus tard, j’apprends que Santiago doit, à nouveau, réaliser un test de dépistage car il y a de nombreux cas de covid dans sa classe.
Je prends rendez-vous au laboratoire et demande à ce que soit réalisé un test salivaire.
Santiago, Vilnius (qui nous accompagne) et moi devons patienter dans une salle d’attente où la toux est maîtresse.
On nous libère enfin une salle de prélèvement. Santiago ne doit pas cracher mais baver. Les consignes sont claires et strictes.
Santiago bave donc. Mais au bout d’un moment, il en a marre.
-J’ai plus de bave, me confie-t-il.
-Pense à un pain au chocolat ? Un bonbon ?
Il bave encore un peu.
J’estime que le niveau de salive est suffisant.
La laborantine est presque hilare et nous balance, acerbe, qu’il n’y pas la moitié de ce qu’il faut.
On retourne dans la salle de prélèvement.
Santiago bave encore un tout petit peu pour faire plaisir à sa mère.
Il change de couleur et je crie :
-Vilnius, cours et ouvre la porte !
Il court, j’attrape Santiago et je cours ! Nous nous retrouvons à l’extérieur du labo, sur la partie enherbée près de la file d’attente la plus longue de l’année et Santiago rend à César ce qui appartient à César.
Je tends le flacon à la gentille laborantine lui confiant qu’on va arrêter le massacre.
Elle change d’avis et estime que le niveau de salive est suffisant.
Nous rentrons à la maison et Vilnius annonce :
-Tu vois maman, je te l’avais bien décrit le test salivaire !
En effet…