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La gourde

Aventure de maîtresse 2 – La gourde

Depuis le Covid, il y a eu des changements à l’école. L’un d’entre eux, c’est la gourde.

Avant, les enfants buvaient un peu à l’arrache, au robinet. C’était un peu barbare mais personne ne s’en préoccupait.

Maintenant, on demande aux parents de prévoir des gourdes. C’est Top. C’est pratique. Chacun la sienne. Pas de transmission de microbes, virus ou je ne sais quoi.

Le deuxième jour d’école, Lassay les Châteaux me dit qu’il y a un mot dans son cahier.

Ma journée commence souvent par une petite surprise…

Mais que me réserve Lassay les Châteaux aujourd’hui ? Pourquoi ses parents tiennent-ils à m’adresser un mot dès le deuxième jour d’école ? TA TA TAATTTA (musique de suspens).

– « Chère madame la nouvelle maîtresse de Lassay les Châteaux,

Notre fils bien-aimé n’a malencontreusement pas fermé sa gourde cette nuit.

Il a trempé tous ses nouveaux cahiers.

Pouvez-vous lui en donner d’autres ?

Nous pouvons les payer.

Madame les Châteaux»

Mon teint s’empourpre brutalement. Des souvenirs remontent violemment à la surface. Je me revois un mois plus tôt, imprimant chacune des feuilles de ces livrets, caressant le beau papier choisi pour son grain de qualité et son épaisseur impeccable, massicotant sans relâche et reliant avec précision. Je me revois prenant ma plus belle plume pointe ogive pour écrire son prénom sur la page de garde en calligraphie, jetant les essais imparfaits souhaitant apprendre à mes élèves qu’écrire est aussi un art.

Je réponds mentalement à cette maman :

– « Chère gentille madame,

Pourriez-vous apprendre à votre enfant à fermer sa gourde ?

De surcroît, auriez-vous l’obligeance de m’indiquer par quel miracle votre fils est-il parvenu à la toucher en pleine nuit ?

Maîtresse Napoli »

Depuis ce fâcheux incident, quatre de mes élèves ont éclaté leur gourde par terre alors qu’ils souhaitaient se déshydrater, on a pu suivre Essé à la trace parce que le fond de la sienne était percé – c’est à ce moment que Lalleu s’est cassé la cheville en glissant sur la flaque–, j’ai dévissé 107 gourdes trop serrées à la sueur de mon front, j’ai rempli puis désinfecté les 324 gobelets de ceux qui avaient oublié leur gourde.

Comme quoi, y’a du bon dans le covid !

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